Face à l’impossibilité de présenter Acqua Alta, leur spectacle en réalité augmentée conçu à Chaillot en décembre, le duo Claire Bardainne et Adrien Mondot propose une version numérique, diffusée sur Arte Concert, lundi 18 janvier à 20h30. La promesse d’une expérience esthétique, et virtuelle.
Derrière un écran translucide, dans un espace cubique, une femme et un homme s’installent côte à côte. Sur une Bagatelle de Beethoven, les deux corps se cherchent, se repoussent pour mieux se lier. Feu follet, la danseuse Satchie Noro danse, tourne, virevolte. Moins expansif, plus retenu, le danseur Dimitri Hatton tente de la suivre dans ses tocades. D’une main, elle efface les points blancs pixélisés sur la toile qui fait office de quatrième mur. Immédiatement, Dimitri Hatton répare, remplace. Elle aime le désordre, l’imprévu. Il préfère que tout soit bien rangé, que rien ne dépasse. À l’opposé l’un de l’autre, ces deux êtres discordants trouvent dans cette forme poétique, l’expression de leur union.
Un jour de pluie diluvienne, leur univers bascule. La tempête est féroce, rien ne peut l’arrêter. L’eau monte inexorablement, engloutit leur maison. Emportée par une mer d’encre, la femme disparaît. Ne reste que ses cheveux. Vivants, ils sont le dernier espoir de l’homme de retrouver celle qu’il aime. Commence alors une quête intime, une lutte contre les éléments, un parcours initiatique au cœur d’un imaginaire terrible et magnifique.
Construit comme une épopée lyrique à la lisière entre danse et arts numériques, Acqua Alta, premier spectacle véritablement narratif du duo Claire Bardainne et Adrien Mondot, invite à lâcher prise avec le réel pour mieux se plonger dans un monde virtuel. Fruit de la conjugaison de leurs talents- elle, plasticienne et graphiste, lui, jongleur autodidacte et ingénieur informaticien- cette fiction aquatique se déplie tel un rêve éveillé, une vision exaltée d’un drame à venir.
Soucieux de la planète face à l’inéluctabilité du réchauffement climatique, Claire Bardainne et Adrien Mondot déploient une œuvre sensible qui affronte la question de la catastrophe. Hypnotisé par la virtuosité des deux danseurs, le spectateur se laisse happer dans ce monde 2.0, qui l’oblige bien au-delà de la dimension poétique de l’œuvre à regarder vers l’avenir, à questionner son rapport à la nature, à réveiller sa conscience écologique.
Décliné en trois variations, ce spectacle de théâtre visuel mêlant danse et images numériques vivantes, sera d’abord diffusé sur Arte lundi soir, puis deviendra un livre dont les dessins et les volumes en papier forment les décors de l’histoire et s’incarnera aussi en une expérience de réalité virtuelle où l’une des scènes pourra être vécue de façon immersive dans un casque individuel, qui sera accessible, on l’espère dès la réouverture des théâtres, Acqua Alta est une œuvre rare, délicate, qui rappelle ô combien l’art recèle de perspectives, de possibilités de réinvention, de métamorphoses, que rien ne pourra mettre à l’arrêt.
Acqua Alta, compagnie Adrien M. & Claire B. Filmé à Chaillot – théâtre national de la Danse en décembre, diffusée sur Arte, lundi 18 janvier 2021 et ensuite disponible en replay, sur Arte.tv. Plus d’informations en suivant ce lien.