Tristan comme « Révolte », « Tumulte » ou encore comme « Druide », selon les diverses pistes éthymologiques celtiques-galloises. Ranx, comme RanXerox, l’androïde de fiction de Tanino Liberatore ? Sous un abord de druide affable, l’homme masqué derrière le pseudonyme de Tristan Ranx cache à peine le grand tumulte qui l’habite. Chroniqueur à Transfuge, celui-ci nous emmène chaque mois dans un périple qui mène la réalité géographique de ses pas, à celle plus touffue de ses tropismes. Parti cette fois-ci sur les traces du poète et navigateur anglais Walter Raleigh et de la cité légendaire de Manoa, gardée par les mystérieux hommes sans têtes, Tristan Ranx s’est d’abord rendu au Guyana, une ancienne colonie hollandaise qualifiée par notre écrivain-voyageur de « pays le plus méconnu au monde au point qu’une lettre destinée au Guyana risque d’arriver au Ghana ». La capitale Georgetown ? Circulez, rien à voir. « La seule chose connue du Guyana, c’est la secte de Jim Jones, cet illuminé américain qui entraîna dans sa mort 908 disciples dans les années 70 ». Le Guyana, décidément si pittoresque, n’est qu’une porte d’entrée vers d’autres paradis convoités par notre aventurier des lettres : le mythique Eldorado et ses montagnes d’or qui, depuis des siècles, ont voué à leur perte, physique ou mentale, nombre d’allumés. Mais voici Tristan Ranx dans la petite ville de Bartica, dans cette Amazonie sans retour, ou presque, ce Moloch de verdures qui avale tout ce qui a l’affront de s’approcher trop près de lui. Cette cité de fin du monde est le point de départ d’une descente en pirogue sur la rivière Cuyuni, l’autoroute aquatique infestée de piranhas qu’empruntent jour et nuit les chercheurs d’or. Le voici enfin aux portes de la mine d’Aurora, au nom si fabuleux puisqu’il nous ramène à un beau livre de l’écrivain-poète et explorateur Michel Leiris… La boucle est-elle bouclée ? Pas tout à fait, Tristan Ranx achève son périple en Europe, au point de départ de ce qui fut la conquête des Amériques, le port andalous de Sanlucar de Barrameda d’où partirent les caravelles, du temps de Magellan et Colomb. Conclusion prudente de l’auteur de ce récit fiévreux formidable d’éruditions : « Le véritable aventurier est celui qui va où il ne devrait pas aller mais qui s’arrête à temps. C’est paradoxal mais c’est ça. Tu peux continuer seulement si tu es mort ! » ( rires).
Nuevo Dorado,Tristan Ranx, Hoëbeke/ Etonnants Voyageurs.