Lancée en 1999, le Caine Prize – dont les présidents d’honneur sont les prix Nobel de littérature Wole Soyinka et J.M Coetzee -, frère du prestigieux Booker Prize, est décerné chaque année à un écrivain africain pour une nouvelle publiée en langue anglaise. Snapshots rassemble six de ces nouvelles. Voici l’Afrique d’une toute petite fille, racontant dans un souffle candide et déchirant l’injustice sociale, les pertes tragiques, les rencontres providentielles, les hasards terribles (NoViolet Bulawayo, « Snapshots »). L’Afrique mondialisante d’un enquêteur cinglé, partant sur les traces d’une jambe coupée avec le panache d’un Eastwood, période Créance de sang ; héros absurde d’un pays en proie au délire, décrit dans un rythme parfait. Jugez plutôt : « Quel tableau. Quel tableau navrant. Quel tableau navrant comme l’enfer. » (Constance Myburgh, « Hunter Emmanuel. »). L’Afrique tragi-comique des prêcheurs de miracles, étrillée par le génial pince-sans-rire Tope Folarin (« Miracle »). L’Afrique traditionnelle, l’Afrique imparfaite, mais l’Afrique mère que l’on se déchire à laisser derrière soi, même – ou surtout – quand on est nigériane, intellectuelle et homosexuelle (« America », Chinelo Okparanta). L’Afrique injectée de sang des enfants drogués à la colle et ivres de combats de rue (« Jours de baston », Olufemi Terry). L’Afrique invraisemblable, libre, fantaisiste, l’Afrique magistrale, absurde et triomphale d’un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale, Bombay, s’autoproclamant à son retour du front, entre autres, président de sa propre République, Seigneur de toute la flore et la faune, patriarche des États-Unis d’Afrique, et père de l’Internet (Rotimi Babatunde, « La République de Bombay »). Ces six « nouvelles voix » sont autant de chocs, émotionnels, esthétiques, littéraires. Six remarquables leçons d’« histoires ».
Snapshots – Nouvelles voix du Caine Prize : une poignée de nouvelles pour montrer l’Afrique en ses œuvres (vives). éditions Zulma.