Le festival International de Bordeaux Métropole bat son plein. Dans différents endroits de la métropole girondine, spectacles, rencontres, expériences immersives font la joie des festivaliers. Récit d’une journée d’octobre artistiquement internationale et éblouissante.
Le marathon théâtral débute par le studio de création du TnBA, partenaire privilégié du FAB. Sur le plateau, le Collectif Les rejetons de la Reine peaufine les derniers ajustements de leur pièce, Un Poignard dans le cœur. Sélectionné au prochain festival Impatience, le spectacle invite à une immersion vertigineuse au cœur de la famille, de ses secrets, de ses cadavres dans le placard. Un dimanche midi, un père charmant, débonnaire, une mère un brin survoltée, reçoivent à déjeuner leur fille, celle chérie de son papa, et sa petite amie, une militante activiste. Le tableau a tout d’idyllique. Très vite, les sourires sonnent faux, les paroles sont creuses. La trop bien huilée mécanique s’enraille. Le dérapage est inévitable, burlesque, potache, jubilatoire. L’œuvre en devenir brise tabous, silences, faux semblants, et esquisse la satire acide de nos sociétés bienpensantes.
Un peu plus tard, non loin de la place de la Bourse et du miroir d’eau, sur les barges, Charbel Samuel Aoun, plasticien et architecte libanais, qui vient tout juste de s’installer en France, après avoir fait ses adieux à Beyrouth cet été, invite lors d’une discussion informelle à repenser l’urbanisation des villes, à redonner à la nature sa place dans nos vies citadines. Travaillant à partir de matériaux recyclés, branches d’arbres tombées au sol, argile récupérée dans le lit de la Garonne, il propose lors d’une performance, de réinvestir la cité, d’essayer de lui donner un autre visage. Passionné, l’artiste fascine par sa capacité à projeter ses rêves dans la réalité.
En fin d’après-midi, à la manufacture, CDCN Nouvelle Aquitaine, l’israélienne Meytal Blanaru questionne dans Undivided les rapports humains et sociaux. Entourée de quatre danseurs et d’un musicien, la chorégraphe dissèque la capacité de chacun à aller vers l’autre, cet inconnu aussi bienveillant qu’hostile. D’un regard enflammé, d’un geste esquissé, les interprètes rejouent les interactions intimes, amicales ou tout simplement cordiales, qui régissent nos sociétés contemporaines. Avec humour et beaucoup de tendresse, ils brisent le quatrième mur et convient des spectateurs à les rejoindre au plateau, à entrer dans la ronde des interactions humaines, créant ainsi un joli moment d’universalité.
Mais parler de cette sixième édition du FAB, sans évoquer les artistes qui par leur notion du collectif, composent des œuvres protéiformes qui associent le public, serait oublié tout un pan de l’ADN du festival imaginé par sa directrice Sylvie Violan. Ainsi, le Panique Olympique d’Agnès Pelletier, fondatrice la Cie Volubilis, sorte d’immense Flash Mob reprenant une gestuelle très inspirée par l’athlétisme, a embarqué la cité girondine dans une folle farandole à la joie des plus communicatives. Le phénomène régional, lancé il y a six ans, ne cesse de s’amplifier. Il devrait atteindre son apogée en 2024, pour une session spéciale à Paris, lors du lancement des jeux olympiques.
Pour finir en beauté la soirée, Salle Vitez du TnBA, le subjuguant et ténébreux Fuck Me de Marina Otero fait salle comble. Et c’est un immense plaisir de quitter Bordeaux, avec les images baroques de ce cabaret tragicomique dans les yeux.
FAB, jusqu’au 23 octobre, plus d’infos sur https://fab.festivalbordeaux.com