Des impacts de la vidéosurveillance sur nos vies à la place de l’art dans les réflexions sociétales : le Lavoir Numérique mène l’enquête… 

C’est devenu un rituel : chaque trimestre, le Lavoir Numérique s’empare d’une réflexion sur l’audiovisuel. Après une première exposition sur le web et ses implications dans notre quotidien, ledeuxième volet porte sur la vidéosurveillance. Laurent Carlier, commissaire de l’exposition, propose d’appréhender des œuvres artistiques qui jouent avec la vidéosurveillance tout en incitant à penser les enjeux et conséquences de ces technologies. L’exposition débute et se conclut par des documents qui posent un cadre. L’installation Technopolice produite par l’association la Quadratune du Net implique le corps du visiteur pris pour cible d’un dispositif de reconnaissance faciale. Tandis que le reportage du site Loopsider présente les liens entre les start-up de cyber-surveillance et l’extrême droite. « Vidéosurveillance : sur-prise du visible » assume donc un regard critique et militant sur ces technologies en pointant les dérives de ses usages, « sans dramatiser, insiste Laurent Carlier. Je souhaitais avoir une approche artistique qui ne soit ni catastrophiste ni défaitiste en montrant ce qui fait monde en dehors d’un concept jouant sur la culture de la peur ». 

Les photographies de Kurt Caviezel abordent avec humour la présence des dispositifs de surveillance. Des oiseaux y posent devant des caméras qu’ils ont transformé en nid. Plus ironique est la série de photographies Cloud Faces réalisée à l’aide d’un logiciel de reconnaissance faciale. Le duo coréen Shinseungback Kimyonghun a constaté que ces technologies pouvaient elles aussi être atteinte de paréidolie, cette illusion d’optique qui fait voir des visages dans des nuages. Si cela peut paraître a priori poétique, qu’en est-il de leur utilisation ? Stéphane Degoutin et Gwenola Wagon imaginent un monde inspiré d’Erewhon , le roman de Samuel Butler où l’utopie s’est transformée en dystopie. Dans ce nouvel environnement hyperinformatisé où le désir est banni, les habitants s’adonnent à des loisirs sans intérêt, tout en exploitant le vivant. 

Dans un autre registre, mais toujours dans un souci de créer à partir de ces problématiques et d’inciter à la réflexion, Leila Chaix expose un numéro de sa revue Autodrône sous la forme d’un collage multimédia. Elle y a invité artistes, chercheurs et amis à proposer des documents visuels ou textuels autour d’un thème, ici la surveillance, mettant au même niveau images glanées, créations d’artiste et documents de bibliothèques. L’exposition présente enfin deux solutions créatives destinées à contourner la surveillance. L’artiste et designer Danielle Baskin a imaginé des masques ayant l’apparence de vrais visages. Tandis que le designer Ceren Paydas a mis au point une écharpe équipée de LED infrarouges éblouissant l’objectif des caméras et empêchant ainsi la reconnaissance faciale. Où l’on montre tout au long de cette exposition la place que peut prendre l’art dans la société, par sa capacité à détourner et créer à partir du pire. 

Vidéosurveillance : sur-prise du visible – Le Lavoir Numérique – Jusqu’au 9 janvier

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