La galerie Vallois explore en une très judicieuse exposition collective la notion d’à-plat en peinture qui est tout le contraire de platitude…

Des couleurs franches, des formes épurées, des lignes claires, les œuvres présentées dans cette exposition pensée par Marianne Le Métayer, la directrice de la galerie Vallois, explorent l’esthétique de l’aplat. Qu’ils peignent une fleur, un corps, un paysage, une enseigne de cinéma, ou un nu, les artistes exposés n’expriment pas tant leur intériorité qu’ils ne témoignent avant tout de leur époque. Celle de la culture de masse et des cinémas, de l’industrialisation des zones périurbaines, du tourisme, avec les cartes postales de motels américains assemblés dans un kaléidoscope psychédélique par William Wegman. On pourrait croire qu’ils appartiennent tous à la même génération, celle pop des années 60-70. Et pourtant, Aplatitudes ! fait se côtoyer des artistes de deux générations successives et des œuvres réalisées dans les années 70 et dans les années 2020. Or, ces deux époques ont justement en commun la diffusion à grande échelle d’images sur écrans, qu’ils soient billboards, pages de magazine et autres surfaces publicitaires imprimées, ou numériques. Deux époques marquées par la communication de masse donc. Les figures peintes semblent comme écrasées sur la surface de la toile écran, niant les volumes et la matérialité qui les constituent, pour devenir figures en deux dimensions, images, représentations. Le corps de l’odalisque d’Antoine de Margerie, composé d’une couleur chair et d’une fine ligne qui dessine le contour de ses jambes, se détache sur le fond rouge du mur, le gris du meuble et le bleu du lit. Les corps roses et jaunes du couple peint par Emanuel Proweller forment un motif en contre-forme sur fond orange, signifiant peut-être la plage. Dans son paysage de Créteil, les collines sont rouges et crème, les églises multicolores, les silos orange et jaunes. Le réalisme n’est pas l’apanage de ces artistes. Ils épurent, réduisent les éléments à leur plus simple apparat.

L’ensemble de l’exposition est attrayant par ses couleurs, ses formes, ses scènes légères. Les œuvres discutent, se répondent. La voiture apparemment joyeusement accidentée de Valerio Adami, peintre de la nouvelle figuration qui semble ici frayer avec le futurisme, fait écho à la pastorale contemporaine composée de personnages de Walt Disney de Hervé Télémaque, figure de la figuration narrative. Si l’exposition intègre quelques peintures abstraites, géométriques chez Emmanuel Proweler, psychédéliques chez Antoine de Margerie, l’ensemble raconte surtout des histoires à compléter, telle la peinture de paysage citadin américain d’Alain Bublex, tiré du film Rambo, dont l’artiste a effacé toutes traces humaines. Ou cette forme circassienne posée sur une étendue noire d’Emmanuel Proweler. Ou ce demi-fauteuil de dos vu dans l’embrasure d’une porte peint par Antoine de Margerie. Pour toutes ces raisons, Aplatitudes est une exposition réjouissante qui fait tout simplement du bien.  

Aplatitudes ! Galerie Vallois. Jusqu’au 18 mars www.galerie-vallois.com