Après avoir fait carton plein à Avignon cet été, Tom à la ferme de Michel Marc Bouchard version brésilienne s’installe pour trois semaines au Théâtre Paris-Villette. Attention, sensations brutes garanties !
Le décor est minimaliste. Quelques bâches d’un gris vert sale recouvrent le sol. Loin de la ville, de la civilisation, dans quelques contrées isolées, un homme torse massif et nu (incandescent Gustavo Rodrigues) travaille une terre rouge, une boue ocre. Une femme plus âgée, sa mère (remarquable Soraya Ravenle), l’observe. La vie coule, tous les jours, identique, rythmée par les saisons, le travail de la ferme. Un beau matin, Tom (sidérant Armando Babaioff), un jeune homme, costume, cravates, chaussures cirées, bien comme il faut en somme, débarque. Il est là pour rendre un dernier hommage au plus jeune fils de la maison, son amant, décédé précocement dans un accident. Son arrivée incongrue dans ce monde rural, brut va tout chambouler, exacerber les pulsions sous-jacentes, qu’elles soient violentes ou charnelles et mettre en lumière l’homosexualité trop longtemps tue de l’enfant chéri.
En adaptant au contexte brésilien, qui a vu, avec l’arrivée au pouvoir en 2019 de Bolsonaro, une montée des crimes homophobes, la pièce de Michel Marc Bouchard rendue célèbre en 2013 par le long-métrage de Xavier Dolan, Rodrigo Portella invite à une plongée captivante au cœur de la barbarie et d’une forme de sadomasochisme consenti. Entre attraction et répulsion, Armando Babaioff et Gustavo Rodrigues mènent la danse jusqu’au vertige des sens. Toute en tension sexuelle, rude, primitive, ils brûlent les planches et irradient l’espace d’un feu inextinguible. Véritable uppercut théâtral à l’esthétisme sombre, Tom na Fazenda va au-delà de la beauté primale du geste. C’est un spectacle totalement viscéral inouï et sans concession, qui met le public K.O. Époustouflant !
Tom na Fazenda de Michel Marc Bouchard, traduction d’Armando Babaioff, mise en scène de Rodrigo Portella. Du 9 mars au 1er avril au Théâtre Paris-Villette.