Invité en résidence à Cancale, Olivier Masmonteil se confronte aux paysages marins qui bordent la Manche et renoue ainsi avec la pratique de la peinture en extérieur, revisitant la mémoire tout comme des siècles d’histoire de l’art.
Scruter l’horizon, cette ligne imaginaire où le ciel et la terre semblent se confondre en de multiples variations, nourrit une pratique picturale pleinement inscrite dans la tradition du paysage et que prolonge de nos jours Olivier Masmonteil (né en 1973). De voyages en explorations, de jeux de transparence en superpositions, l’artiste examine ainsi depuis plus de 25 ans les manières de peindre tout comme les différentes étapes d’une histoire de l’art et de ses thèmes classiques.
Artiste voyageur, Olivier Masmonteil considère en effet la peinture comme un moyen de se déplacer dans l’histoire comme dans l’espace. Le paysage demeure ainsi son sujet de prédilection, et parmi ses plus célèbres compositions figure la série Horizon : ici des rayures colorées et soigneusement superposées, comme surplombées par un ciel parfois ombragé, brouillent la partition traditionnellement établie entre abstraction et figuration.
Pour sa nouvelle série débutée au printemps 2023, l’artiste s’installe en résidence à Cancale durant plusieurs semaines pour peindre sur le motif, directement depuis les points de vue sélectionnés avec le galeriste Antoine Dupin, le long de la côte d’émeraude et de ses paysages marins. La pointe du Grouin, la Varde et le Point du jour s’ouvrent sur la Manche et sur la Baie du Mont-Saint- Michel, là où les marées et le ressac permanent s’ordonnent magistralement au subtil ondoiement des courants.
Dans cette série de peintures la reproduction, au lieu de produire du vraisemblable, est gage d’imprégnation et d’atmosphère, comme s’il était question de prolonger les sensations par les moyens picturaux. Cette quête mobilise ainsi une captation élargie, dépassant alors les seuls ressorts visuels conférés par la toile. Cette recherche centrée sur le paysage se développe dès lors dans le cadre des interrogations esthétiques portant sur l’histoire de l’art, Masmonteil rejouant ce que d’autres ont pratiqué avant lui. Et de cette confrontation directe avec les éléments, dans cette immersion physique dans la tempête et son déferlement, il fait de la nature son atelier, y établissant chaque matin son chevalet.
Recueillant les sensations visuelles du paysage, l’artiste renoue ainsi avec une sensibilité romantique où les conditions atmosphériques ont revêtu une importance capitale tant elles ont permis la projection d’impressions sur le paysage, devenu lieu de contemplation. L’artiste peint alors la lumière et ses effets, dont le jeu des reflets agrémente la plénitude d’une mer agitée. Saisies sur le vif, les compositions se réduisent à des plans superposés et colorés, où toute illusion de profondeur a été évacuée. Les contours, la densité et les volumes s’évanouissent avec le mouvement et la lumière, traduisant alors la sensation naturelle du plein air. Ce relatif dépouillement formel célèbre un paysage devenu champ de perception, soit un espace pourvu de radiations et de présence vibratoire, où l’éternel, toujours, s’articule au transitoire.
À l’acrylique, Olivier Masmonteil peint le fond, représente l’espace. À l’huile, il évoque le temps, un moment saisi sur la toile. Ses tableaux cristallisent alors un rythme où viennent s’articuler l’éphémère et la durée, le mouvement et l’immobilité. De fait, Masmonteil intègre pleinement les données climatologiques dans la conception de ses images afin d’en accentuer l’atmosphère, s’attachant ainsi à dégager les caractères spécifiques de l’air, de l’eau et de la terre. Soit un art où prédomine la vérité du ciel et un unique horizon, celui de la mémoire.
« Olivier Masmonteil, La mémoire de l’horizon ». Exposition du 14 juillet au 2 septembre 2023. Galerie Antoine Dupin – Saint-Méloir-des-Ondes