Une sélection de nouvelles œuvres d’Hélène Delprat à la galerie Hauser & Wirth laissent transparaître un sens de la comédie et de l’absurde.
Foisonnante, facétieuse, fantasque si ce n’est fantastique, les qualificatifs pour cerner l’œuvre de l’artiste multidisciplinaire Hélène Delprat (née en 1953) fleurissent sans pour autant formaliser dans leur totalité l’ensemble des sentiments que cette dernière suscite. Au sein de l’écrin d’exception que forme l’espace d’exposition de la galerie Hauser & Wirth, ses récentes réalisations se déploient et partagent au regard des outrances expressives proches de la caricature et de l’imagerie populaire, soit de tout un répertoire d’exagérations qui instruisent des vanités et du théâtre de la guerre. Cette dernière forme en effet une grande fresque à la dramaturgie certaine, laquelle rend compte d’une vision burlesque toute portée par une dynamique ludique, voire un non-sens généralisé. Car dans ces toiles de grand format empreintes d’une singulière énergie, au sein de leurs surfaces densément texturées – toutes peuplées de formes fantasmagoriques et d’images partiellement cachées – il est surtout question du concept de « Serio Ludere » – terme inventé à la Renaissance qui signifie « jouer sérieusement » : ici, le tragique et les allusions à la mort laissent transparaître un sens de la comédie et de l’absurde.
L’univers d’Hélène Delprat est en effet truffé de références à la culture de la Renaissance, une période profondément marquée par l’encyclopédisme et la curiosité, mais aussi par les paradoxes et par l’étrangeté. Parsemés de paillettes et parfois mouchetés d’or, soit d’éléments à l’effet faussement festif, ses tableaux multiplient également les références cartoonesques et font part d’un éclectisme rare qui témoigne d’une variété de sources artistiques, littéraires et philosophiques ; toutes destinées à contrebalancer une symbolique sombre et funeste. « Intellectuellement, je pars de tout ce que je vois », explique alors l’artiste. « […] Il n’y a pas vraiment de travail préparatoire, sauf toutes ces lectures, toutes ces curiosités, ces journaux que je feuillette et ces informations que j’écoute, toutes les photos que je fais ou que je découpe. La préparation c’est juste ce que je vis. »
Plasticienne hors-norme, c’est après avoir étudié la peinture aux Beaux-Arts de Paris qu’Hélène Delprat devient pensionnaire à la villa Médicis et atteint une notoriété internationale. À partir des années 1990, elle s’écarte de son médium de prédilection pour s’intéresser à d’autres formes de création – photographie, vidéo, radio – mais aussi littérature, théâtre, performances et installations, procédant alors à de nouvelles expérimentations où documentaire et fiction s’avèrent étroitement liés. Son œuvre reste alors ancrée dans sa curiosité infinie, dans son penchant pour la collecte d’informations sur le monde qui l’entoure, mais aussi sur celui qui le précède. Aussi et depuis quatre décennies, sa pratique polymorphe interroge la vie et la mort. Comme l’artiste le précise « j’aime les choses rugueuses, grinçantes, un peu monstrueuses ou extravagantes » … soit tous les ferments d’une fertile existence.
Hélène Delprat. MONSTER SOUP. Hauser & Wirth Paris 20 janvier – 16 mars , Plus d’informations