Nouvelle mise en scène de l’opéra de Philippe Boesmans, Julie se promet d’être un songe hypnotisant à l’Opéra de Lorraine.
C’est une toute jeune oeuvre qui se produira ce mois-ci sur la scène de l’Opéra de Lorraine : Julie, de Philippe Boesmans, créée en 2005, par Philippe Boesmans et Luc Bondy à la Monnaie de Bruxelles. C’était alors le quatrième opéra de Philippe Boesmans, devenu depuis l’un des très grands noms de la création lyrique européenne. Opéra de chambre, Julie nous relance sur la trace d’un personnage déchirant, la Mademoiselle Julie de Strindberg. Le livret, en allemand, se fonde sur une adaptation de Luc Bondy, dont on regrette tant le génie théâtral. Depuis sa création, l’opéra a été mis en scène plusieurs fois, séduisant par ce resserrement en un acte du drame humain des trois personnages, Julie, la fille du propriétaire aristocrate, Jean, le domestique prêt à tout, et Kristin, la jeune domestique, contrepoint lumineux de la pièce. On se souvient de la férocité de certains échanges : « Je voudrais vous abattre comme une bête », lance Julie à Jean dans leur face-à-face dominateur et sexuel. La musique en sera à l’aune : l’orchestre de chambre sera dirigé par Emilio Pomarico, et composé d’un trio de solistes qui restreint la pièce à un huis clos puissant. Boesmans, dont on a tant apprécié la dernière création à l’Opéra Comique, Des Eclairs, adaptation d’un roman d’Echenoz,s’inscrivait déjà là dans une approche de la fiction, par la musique. Ici, dans la hantise de Julie, la fille de l’aristocrate traversée par une pulsion qui la dépasse, et qui se révèle lors de la Nuit de la Saint-Jean. Silvia Costa, qui mettra en scène l’opéra, souhaite mettre en avant le mystère et le « mouvement » de Julie, personnage aussi vive que tragique qui se révèle lors de cette célébration de la Saint-Jean, rite de l’arrivée de l’été, moment païen, festif, libérateur. Strindberg aimait à dire que la vie n’était qu’une « immense dérision ». De cette noire férocité, Julie est née. Personnage insondable, inoubliable dont Philippe Boesmans fait résonner une nouvelle fois le destin.
Julie, de Philippe Boesmans, d’après la pièce Mademoiselle Julie d’August Strindberg, direction musicale, Emilio Pomarico, mise en scène, Silvia Costa. Opéra national de Lorraine, du 27 mars au 1er avril.