Les œuvres de Nicolas Dhervillers exposées au Drawing Hotel, transportent au-delà de ses ciels lumineux et de ses espaces indécis.
De ses ciels nuageux de la série Remake émane une lumière indéfinissable, tandis que dans le brouillard épais, cotonneux de sesCrossfade apparaissent des scènes de vie difficilement perceptibles. Les œuvres de Nicolas Dhervillers permettent la contemplation d’instants fugitifs en en fixant le mouvement. L’artiste recouvre la surface du papier de couches de pastels, efface de ses doigts les contours, créant un sfumato qui rappelle la peinture de la Renaissance ; tandis que le rendu final évoque la puissance des paysages peints par William Turner. Dans la série Crossfade, l’artiste y intègre des détails, ici une barque, là une forêt, dessinés avec minutie ; en apparence seulement. Car ces éléments ne sont pas nés du crayon de l’artiste. Ils sont tirés de photographies des grandes expéditions américaines de la Hudson School au XIXe siècle, tout comme les ciels sont inspirés des peintres de ces mêmes explorations. Nicolas Dhervillers en extrait des éléments qu’il imprime délicatement sur les couches de pastels. La série tire d’ailleurs son nom de la technique cinématique du crossfade, ce fondu enchaîné permettant de lier deux images distinctes. Déjà en 2010, pour sa série Tourists, puis My sentimental Archives (2011), Hommages (2011) et Uncertain Fates (2019), Dhervillers s’emparait des protagonistes de peintures du XVIIIe et du XIXe siècle pour les intégrer à ses photographies de paysages. L’étrangeté résidait non pas dans cette rencontre fortuite mais dans la source lumineuse, tant il était difficile de discerner la lumière naturelle de l’artificielle. Cette incertitude se retrouve dans la représentation de ces moments suspendus qu’il ne définit pas précisément, comme pour laisser le regardeur libre de ses interprétations. Sommes-nous témoins du lever ou du coucher de soleil, de l’arrivée ou de la fin d’une tempête, d’une scène joyeuse ou violente ?
Les œuvres de Nicolas Dhervillers racontent la rencontre. Entre les médiums : le pastel, la peinture, la photographie et le cinéma. Entre les époques : celles des grandes explorations et du monde contemporain. Entre le réel et la fiction. L’artiste ne choisit pas, il rassemble. Ses œuvres invitent à un voyage immobile. À l’instar de l’homme explorant le monde derrière son écran, fouillant internet à la recherche de détails d’images qu’il va pouvoir manipuler. Pour sa série The Light Has Always Been There (2018), il avait ainsi arpenté l’arctique et l’antarctique, embarqué sur Google Earth. Chaque œuvre se composait de centaines de photographies prises par satellites pour créer des images hyperréalistes de paysages enneigés tout autant réels qu’imaginaires. Avec ses dernières séries exposées au rez-de-chaussée du Drawing Hotel, Nicolas Dhervillers explore le ciel, ses variations, ses représentations picturales et photographiques à travers les siècles et les continents. Et nous transportent.
Nicolas Dhervillers. Drawing Hotel, Paris. Jusqu’au 15 janvier. www.drawinghotel.com