Pensée dans le cadre des 30 ans du carré d’Art de Nîmes, l’exposition d’Oliver Laric présentée au Musée de la Romanité consacre l’idée d’un patrimoine antique toujours réactivé.
Les œuvres d’Oliver Laric (né en 1981) défient la flèche du temps tant l’artiste autrichien y entrelace Antiquité et présent. Au regard de ses sculptures exposées à Nîmes, au musée de la Romanité, l’œil est d’emblée frappé par leurs compositions hybrides à la teneur fragmentée : réalisées au moyen de technologies récentes, elles font signe vers les œuvres gréco-romaines dont elles dégagent les profondeurs historiques jusqu’à en reformuler le tissu sensible.
Portée par une scénographie élégante qui prend appui sur une atmosphère feutrée et un éclairage tamisé, chacune irradie l’espace de leur similitude qui atteste de leur parenté. Sagement alignées ou bien mises en miroir, elles réinterprètent les œuvres anciennes par une réplique qui ne se confondrait pas avec une simple répétition, mais s’envisagerait bien plutôt à la manière d’une inépuisable continuation. Sans cesse semblable et toujours différent, l’identique se dilue dans la singularité car ici, c’est bel et bien l’authenticité qui est remise en question, l’artiste s’intéressant aux possibilités infinies de variations tout comme aux stratégies de diffusion offertes par l’histoire de l’art et le monde numérique contemporain.
Depuis la fin des années 2010, Laric s’illustre en effet dans le courant dit « post-internet » et développe une production artistique matérielle, toujours ancrée dans l’art digital. Grâce au Scan 3D, il réalise des copies numériques d’œuvres d’art historiques et permet à ces dernières d’investir la culture populaire. Plusieurs vidéos en témoignent : clips musicaux, reportages ou bien encore publicités sont ainsi nés de l’exploration inattendue des scans par d’autres créateurs.
Ses sculptures déjouent pour leur part la distinction classique établie entre l’original et la copie, la froideur marmoréenne de la statuaire antique laissant alors place à une légèreté inaccoutumée où des textures parfois tramées et ajourées s’ajustent à une structure faite en aluminium. Les socles traditionnels sont remplacés par des cadres métalliques à l’épure aérienne et c’est en utilisant une gamme étendue de techniques de finition que l’artiste réinvestit les figures mythologiques à l’exemple de Cupidon. Avec l’Hermanubis et l’Enfant au chien, Laric se focalise également sur l’étude des formes humaines et animales jusqu’à aborder la thématique de l’hybridité, reconstituant ainsi un hermaphrodite endormi qu’un collectionneur avait transformé en Vénus. Avec ses collaborateurs, l’artiste met bel et bien la documentation scientifique à l’épreuve de la subjectivité, concentrant son attention sur des sculptures qui ont perdu une part de leur intégrité. De la statue fontaine de Neptune, il a élaboré différentes hypothèses permettant d’imaginer ce à quoi cette œuvre fragmentaire, emblématique du musée, pouvait ressembler. Laric dévoile ainsi une cohabitation possible des styles, des époques et des humains avec l’ensemble du vivant. Comme une mise à jour d’une mémoire vive, celle d’une Antiquité demeurée intacte.
Exposition Mémoire Vive. Oliver Laric. Musée de la Romanité, Nîmes, jusqu’au 31 décembre. www.museedelaromanite.fr