En 2018, à l’âge de neuf ans, Arielle Beck remporte le premier prix du concours Jeune Chopin, sous l’égide de Martha Argerich. Présente à La Roque d’Anthéron, elle fait partie de ces jeunes musiciens dont le nom risque de retentir longtemps…
« J’étais toute petite et mon demi-frère, de quinze ans de plus que moi, jouait la toccata de Prokofiev… J’adorais, je me mettais sous les couvertures et je l’écoutais ». C’est à ce souvenir qu’Arielle Beck, 15 ans, fait remonter son amour pour le piano. Ses parents, littéraires mélomanes, passent en boucle les trios pour piano et cordes de Haydn. Et Arielle Beck d’avouer que la musique de chambre a toujours été l’une de ses grandes passions. « Même si ça n’était pas facile, lorsque j’avais six ou sept ans, de devoir jouer avec des gens qui en avaient au moins le double et me regardaient comme la « petite » ».
Dès l’âge de quatre ans, elle se met au clavier. À sept, elle comprend – c’est une évidence – que la musique sera son métier. « Je ne voulais plus faire que cela », confie-t-elle. Elle se forme auprès d’Igor Lazko qui lui apprend à créer des passerelles entre son art et tous les autres, qui lui fait lire des contes traditionnels russes quand, à son tour, elle travaille Prokofiev. À quatorze ans, c’est-à-dire l’an dernier, elle entre au CNSM, dans la classe de Claire Désert. « J’aime la relation de confiance que nous avons. Elle fait preuve d’une grande souplesse avec ses élèves, elle me guide dans mes choix d’interprétation mais ne m’impose rien, elle soutient mes propositions et m’aide à construire judicieusement mes programmes ».
À La Roque d’Anthéron, cette année, le programme était presque déjà trouvé, à peine l’invitation lancée ; « René Martin sait à quel point j’aime Schumann, alors il m’a suggéré un récital et un concert qui lui seraient dédiés ». Dans la même soirée, elle jouera Humoresque, une pièce qu’elle chérit pour sa fantaisie mais sa structure complexe, et Trois romances. Deux heures plus tard, elle interprétera le concerto de Schumann, aux côtés de l’Orchestre Philharmonique de Marseille. « Ce sera une expérience intense mais certainement formatrice ».
Dans le panthéon d’Arielle Beck, Schumann est donc au sommet, mais on y trouve aussi Chopin, Scriabine et Ravel. Mozart, bien sûr, dont elle a joué, à dix ans, le 12e concerto lors de son tout premier concert avec orchestre, à l’Unesco. Dans ses projets d’avenir, sans doute un disque, sans doute encore Schumann. « Parfois, j’ai des lubies », dit-elle. Elle ne veut plus jouer que du Fauré ou du Mozart. Façon de se forger sa personnalité ? Lorsqu’elle se raconte, c’est d’une voix encore enfantine, encore fragile de très jeune fille, et pourtant sa précision impressionne et émeut. Elle se reprend parfois, pour trouver le mot le plus juste, la formule la plus exacte. Et l’on devine dans l’importance qu’elle accorde à cette exactitude sa puissance de travail, sa rigueur, qui n’excluent pas l’humour et le délicatement fantasque. À ses heures perdues, elle dessine, fait du Pilates et des claquettes. Et elle compose aussi. Son rêve : ni jouer dans une grande salle en particulier ni avec certains musiciens spécifiquement. Ce que veut Arielle Beck, c’est que la carrière qui est déjà la sienne continue de se déployer, la mène à travers le monde, pour jouer et jouer encore. D’ailleurs, une à une, les grandes salles commencent à la suivre, à lui ouvrir leurs portes. Et nous, à écouter cette promesse de beauté se tenir, s’épanouir, résonner.
À La Roque d’Anthéron le 22 juillet
Mais aussi :