Magnifique rentrée française que ce cru 2014. Ça faisait longtemps qu’on n’avait pas pris autant de plaisir de lecture. Un premier roman enthousiasmant, de Philippe Bordas, Chant furieux, d’une langue neuve, mélange d’oralité et de préciosité ; une confirmation avec le nouveau Éric Reinhardt, L’Amour et les Forêts, roman pervers à souhait et, dans sa construction, grande force du romancier, parfaitement maîtrisé. Mais c’est Deville et Volodine qui ont fait l’unanimité au sein de l’équipe rédactionnelle de Transfuge. Le premier signe Viva, roman où se croisent les destins de Trotski, Lowry, Kahlo, Rivera, Breton, Artaud et quelques autres. Tous ces personnages ont en commun d’être passés plus ou moins longuement par le Mexique dans l’entre-deux-guerres ; d’avoir été, chacun à sa façon, révolutionnaire. Deville, dans une grande maîtrise narrative, microfictionne nerveusement. On passe sans cesse dans ce roman d’une histoire à l’autre, et il finit par rendre parfaitement bien une époque chaotique, d’espoir révolutionnaire, de rêves joyeux, romantiques, déçus, douloureux, misérables. Antoine Volodine, avec son Terminus radieux, livre un roman postapocalyptique russe. Le texte est ample, très narratif, comprend une dizaine de personnages, dont un corbeau. C’est un roman d’aventures – Volodine nous a confessé lors d’un très long entretien sa passion pour Jack London, Curwood ou encore Jules Verne. C’est un roman politique – Volodine ne cesse de se demander ce qu’est devenu l’idéal communiste, et ce qu’il a été. C’est un roman chamanique, où le Bardo s’invite ici et là dans les multiples narrations. Ce très grand romancier mérite une place bien plus importante que celle qui lui était accordée jusqu’à présent en France. Nous lui rendons justice dans ces pages. Chers lecteurs, je vous souhaite une belle rentrée de lectures. Allez en librairie acheter des romans français que nous vous conseillons (ne prêtez pas seulement l’oreille au battage médiatique autour de quelques grands noms), je vous assure que vous ne serez pas déçus. En attendant notre numéro de rentrée étrangère le mois prochain.
En plein chaos
On a voté pour Deville et Volodine